SDEP :
Pour rentrer dans le vif du sujet, quelles sont vos influences ?
David
Ivar : plein ! principalement … le Velvet Underground,
Jeffrey Lewis qui est un copain, Julie Doiron qui joue dans Eric’s Strip
et avec qui on a fait une partie de cette tournée, Will Oldham, Cat
Power, Sonic Youth, Sebadoh, Rolling Stones, …
Et
Neman est un peu notre dieu ! Il nous dit d’acheter les Halo Benders
par exemple, on va tous acheter les Halo Benders. Même avant de jouer
de la batterie, il était déjà là et nous conseillait.
Vous
avez beaucoup de chansons dans votre répertoire, comment choisissez-vous
celles qui figurent sur les albums ?
DI :
C’est ce qui est intéressant, on a plein de chansons chacun de notre
côté, c’est quand on se retrouve tous les trois à jouer qu’on construit
l’album.
N :
les dernières qui viennent d’être composées sont souvent celles qu’on
préfère, c’est rare qu’on choisisse des anciennes chansons.
DI :
On nous reproche en général de ne pas jouer les albums sur scène … Mais
hier on a fait les requests ! Les gens nous demandaient des morceaux
des albums, on les a joués, mais en général on joue plutôt autre chose.
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David
Ivar & André |
On a
entendu parler d’un concert à Londres, où tout le gratin de la
presse anglaise était présent, qui ne s’est pas très bien passé ?
DI :
Oui, ça s’est fini en baston générale… J’ai fait une chanson militante
végétarienne, des gens se sont sentis insultés et ça s’est fini en bagarre…
C’était
notre premier concert à Londres, on en a fait plein depuis, beaucoup
plus calmes, mais on voit bien que les gens aimeraient bien que ça se
finisse dans le sang, ils doivent être un peu déçus.
Sortir
le 2ème album sur un petit label américain (Shrimper), ça
vous a aidé à trouver un public aux Etats-Unis ?
C’est
quand même un des labels les plus importants des années 90, je trouve,
avec Sebadoh, les Mountain Goats, Dump, John Davies, tous ces gens sans
qui je n’aurais jamais fait de musique. Je ne sais pas si ça nous a
aidés mais je suis très heureux d’être dessus, puisque c’est un des
labels qui compte le plus pour moi. Et ça nous a permis de faire des
concerts là-bas… Les albums Prohibited commencent à être distribués
aux Etats-Unis ! Je crois par contre que celui-là, chez Shrimper,
n’est disponible qu’en import en France.
Vous
avez chacun eu des projets à côté d’Herman Düne, j’ai entendu parler
en particulier de Rama Huset, une musique d’influence indienne ?
N
et DI : t’en as entendu parler ?
DI :
on a commencé ça à Copenhague, quand on était chez les Hare Krishna,
on a joué dans cette lignée-là, dans le même style que ce que l’on joue
maintenant, mais on avait un sitar et plein de gens qui faisaient des
choeurs, et on faisait des concerts comme ça.
N :
on a sorti nous-même une K7 qu’on vend aux concerts, et on a joué
récemment à Paris. C’était aussi un moyen de gagner de l’argent à une
époque, on jouait pour un antiquaire qui vendait des trucs indiens.
DI :
il croyait qu’on était indien, c’était assez drôle, on jouait des reprises
de Smog au sitar avec un turban sur le tête. Ce mec-là vendait des portes
de temples pendant qu’on jouait sur des tapis au dessus d’un porche,
c’était très bizarre !
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David
Ivar |
Qu’est-ce
que le Royal Academy Against Authority, que vous avez cotoyé ?
DI :
Comment expliquer… c’est le temple et le royaume de ta propre responsabilité
dans chacun de tes pas, et chacun de tes gestes de l’âme.
N :
c’est un engagement individuel : tu t’exprimes par tes propres
actions, en écrivant un texte, une chanson, il n’y pas de règles, ça
n’est pas un parti ni une secte.
DI :
Ca vient au départ d’une phrase de Barnett Newman (un peintre qu’on
a classé dans l’abstract expressionism), que j’ai d’ailleurs déjà utilisée
dans un album d’Herman Düne : « le royaume c’est ici et maintenant »,
je trouve que ça veut dire beaucoup de choses.
On parle
d’un esprit communautaire de Prohibited, comment ça se traduit au quotidien ?
DI :
On est tous dans le même camion en tournée, on partage notre intimité,
on supporte les K7 de Pink Floyd de certains, et les autres supportent
nos K7 de Sebadoh, c’est une communauté !
N :
C’est un petit label, et c’est plus facile de partager entre tous
les musiciens, si les uns peuvent aider les autres c’est pas plus mal.
xw En
plus ça devient n’importe quoi, puisqu’on mélange tous les groupes tout
le temps !
Le dernier
album est plus produit que les précédents, on y trouve quelques arrangements,
mais vous avez quand même tenu à garder l’esprit d’origine ?
Il
n’y a généralement pas de basse sur les morceaux ?
DI :
On n’a pas engagé d’arrangeur quand même, ça reste très simple !
On avait un violon à la maison, André a fait tous les arrangements….
J’ai fait un peu d’harmonica !
Le
fait qu’il n’y ait pas de basse, ça permet d’improviser. On n’a pas
non plus de pédales d’effet. D’ailleurs si, on en a une qu’on emmène
toujours en tournée et qu’on ne sort jamais…
On
aime jouer de la guitare, et les nôtres sonnent bien, donc on se passe
d’effets. Je trouve aussi que ça t’oblige aussi à mieux jouer, et on
n’a qu’un seul jack à porter !
Sur
le livret de Switzerland Heritage, vous avez dessiné les twin towers,
entourées de beaucoup de petites croix, coïncidence ou actualité ?
N :
Oui, malheureusement… ça a été fait bien avant, parce qu’André était
allé là-bas un peu plus tôt, parce qu’on a plusieurs chansons sur
l’album qui parlent de New York.
DI :
On mets très longtemps à les imprimer, ces jaquettes, j’ai dû dessiner
ça début septembre, et ça a pris un autre sens. C’est comme la chanson
des Moldy Peaches, « NY city is like a graveyard », ça n’a
plus le même sens.
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André |
Est-ce
un rêve pour vous de jouer un jour en première partie de Sebadoh, reformés
pour l’occasion ?
DI :
En fait on a déjà réalisé nos rêves : on a joué le même soir
que Daniel Johnston, dans le même festival que Suicide, en première
partie de Two Dollar Guitar, on a fait la moitié de la tournée avec
Julie Doiron dans le groupe, …
On
a par contre loupé un super concert de 3h de Lou Barlow à Paris, puisqu’on
jouait le même soir !
En
même temps, je n’aime pas trop rencontrer les gens que j’admire, j’ai
interviewé Lou Barlow il y a quelques années, Will Oldham aussi … Tu
te rends compte que ce sont des gens comme toi, et quand tu vois que
les gens que tu admirais au lycée disent des conneries avec lesquelles
tu n’es pas d’accord, ça casse le mythe, ce sont finalement des gens
normaux.
Tu as
dit un jour vouloir enregistrer un album avec Chan Marshall (Cat Power),
ça va se faire un jour ?
DI :
Ah ! je croyais avoir dit que je voulais me marier avec elle !
Je veux bien me marier, et enregistrer un album avec elle après. Mais
on n’a rien demandé du tout (rires). On adore ce qu’elle fait.
N :
On joue quand même avec Julie Doiron, et son dernier album en solo est
magnifique, elle toute seule à la guitare, avec une voix superbe.
Et
un son de guitare magnifique !
Parmi
les artistes français, il y a des gens que vous admirez ?
N :
Il y a quelqu’un qui s’appelle Wilfried : on a sorti nous-mêmes
un 45 tours de lui, et il va sortir en février/mars un album sur Prohibited.
C’est quelqu’un qu’on aime beaucoup.
Comment
vous voyez le futur d’Herman Düne ?
DI :
J’aimerais bien que d’ici quelques mois (c’est ce qui est prévu
pour l’instant) on enregistre un album avec Julie Doiron, chez elle
au Canada, puis pourquoi pas poursuivre par une petite tournée avec
elle dans le nord des Etat -Unis.
Et
puis on va en angleterre très bientôt, on va passer chez John Peel.
N :
On va peut-être tourner avec un groupe de Shrimper, Refrigerator, qui
sont en fait ceux qui tiennent le label, mais rien n’est encore sûr.
On
aimerait bien un jour aller habiter aux Etats-Unis.
DI :
Moi j’essaye de sortir des disques, si j’ai un peu d’argent, un
45 tours de Jeffrey Lewis, qu’on a enregistré à Austin.
J’ai
aussi fait une BD, que j’essaye de distribuer.
Interview
réalisée avec Radio Campus Grenoble, merci !
Site
ami :
http://hermandune.free.fr |