Une Interview avec Herman Düne
Le Pez-ner, Lyon, 05 Décembre 2001
propos reccueillis par
Céline Farvacque
         
 

Après la sortie de leur excellent album  «Switzerland Heritage», SDEP a rencontré Herman Düne, à l’occasion d’un concert dans une conviviale petite salle de Lyon.

Avec des voix qui rappellent inévitablement Will Oldham, les deux frères franco-suedois David Ivar et André (guitares et chants), dérouleront un set d’une heure et demie, sans set-list, au gré des envies des uns et des autres, tout comme du public. Les guitares se déchaînent autour d’une rythmique efficace menée par la batterie de Neman, les chansons sont souvent touchantes, habitées par une grâce indéniable.

André

 

SDEP : Pour rentrer dans le vif du sujet, quelles sont vos influences ?
David Ivar : plein ! principalement … le Velvet Underground, Jeffrey Lewis qui est un copain, Julie Doiron qui joue dans Eric’s Strip et avec qui on a fait une partie de cette tournée, Will Oldham, Cat Power, Sonic Youth, Sebadoh, Rolling Stones, …
Et Neman est un peu notre dieu ! Il nous dit d’acheter les Halo Benders par exemple, on va tous acheter les Halo Benders. Même avant de jouer de la batterie, il était déjà là et nous conseillait.

Vous avez beaucoup de chansons dans votre répertoire, comment choisissez-vous celles qui figurent sur les albums ?
DI : C’est ce qui est intéressant, on a plein de chansons chacun de notre côté, c’est quand on se retrouve tous les trois à jouer qu’on construit l’album.
N : les dernières qui viennent d’être composées sont souvent celles qu’on préfère, c’est rare qu’on choisisse des anciennes chansons.
DI : On nous reproche en général de ne pas jouer les albums sur scène … Mais hier on a fait les requests ! Les gens nous demandaient des morceaux des albums, on les a joués, mais en général on joue plutôt autre chose.

David Ivar & André

On a entendu parler d’un concert à Londres, où tout le gratin de la presse anglaise était présent, qui ne s’est pas très bien passé ?
DI : Oui, ça s’est fini en baston générale… J’ai fait une chanson militante végétarienne, des gens se sont sentis insultés et ça s’est fini en bagarre…
C’était notre premier concert à Londres, on en a fait plein depuis, beaucoup plus calmes, mais on voit bien que les gens aimeraient bien que ça se finisse dans le sang, ils doivent être un peu déçus.

Sortir le 2ème album sur un petit label américain (Shrimper), ça vous a aidé à trouver un public aux Etats-Unis ?
C’est quand même un des labels les plus importants des années 90, je trouve, avec Sebadoh, les Mountain Goats, Dump, John Davies, tous ces gens sans qui je n’aurais jamais fait de musique. Je ne sais pas si ça nous a aidés mais je suis très heureux d’être dessus, puisque c’est un des labels qui compte le plus pour moi. Et ça nous a permis de faire des concerts là-bas… Les albums Prohibited commencent à être distribués aux Etats-Unis ! Je crois par contre que celui-là, chez Shrimper, n’est disponible qu’en import en France.

Vous avez chacun eu  des projets à côté d’Herman Düne, j’ai entendu parler en particulier de Rama Huset, une musique d’influence indienne ?
N et DI : t’en as entendu parler ?
DI : on a commencé ça à Copenhague, quand on était chez les Hare Krishna, on a joué dans cette lignée-là, dans le même style que ce que l’on joue maintenant, mais on avait un sitar et plein de gens qui faisaient des choeurs, et on faisait des concerts comme ça.
N :  on a sorti nous-même une K7 qu’on vend aux concerts, et on a joué récemment à Paris. C’était aussi un moyen de gagner de l’argent à une époque, on jouait pour un antiquaire qui vendait des trucs indiens.
DI : il croyait qu’on était indien, c’était assez drôle, on jouait des reprises de Smog au sitar avec un turban sur le tête. Ce mec-là vendait des portes de temples pendant qu’on jouait sur des tapis au dessus d’un porche, c’était très bizarre !

David Ivar

Qu’est-ce que le Royal Academy Against Authority, que vous avez cotoyé ?
DI : Comment expliquer… c’est le temple et le royaume de ta propre responsabilité dans chacun de tes pas, et chacun de tes gestes de l’âme.
N : c’est un engagement individuel : tu t’exprimes par tes propres actions, en écrivant un texte, une chanson, il n’y pas de règles, ça n’est pas un parti ni une secte.
DI : Ca vient au départ d’une phrase de Barnett Newman (un peintre qu’on a classé dans l’abstract expressionism), que j’ai d’ailleurs déjà utilisée dans un album d’Herman Düne : « le royaume c’est ici et maintenant », je trouve que ça veut dire beaucoup de choses.

On parle d’un esprit communautaire de Prohibited, comment ça se traduit au quotidien ?
DI : On est tous dans le même camion en tournée, on partage notre intimité, on supporte les K7 de Pink Floyd de certains, et les autres supportent nos K7 de Sebadoh, c’est une communauté !
N :  C’est un petit label, et c’est plus facile de partager entre tous les musiciens, si les uns peuvent aider les autres c’est pas plus mal.
xw
En plus ça devient n’importe quoi, puisqu’on mélange tous les groupes tout le temps !

Le dernier album est plus produit que les précédents, on y trouve quelques arrangements, mais vous avez quand même tenu à garder l’esprit d’origine ?
Il n’y a généralement pas de basse sur les morceaux ?
DI : On n’a pas engagé d’arrangeur quand même, ça reste très simple ! On avait un violon à la maison, André a fait tous les arrangements…. J’ai fait un peu d’harmonica !
Le fait qu’il n’y ait pas de basse, ça permet d’improviser. On n’a pas non plus de pédales d’effet. D’ailleurs si, on en a une qu’on emmène toujours en tournée et qu’on ne sort jamais…
On aime jouer de la guitare, et les nôtres sonnent bien, donc on se passe d’effets. Je trouve aussi que ça t’oblige aussi à mieux jouer, et on n’a qu’un seul jack à porter !

Sur le livret de Switzerland Heritage, vous avez dessiné les twin towers, entourées de beaucoup de petites croix, coïncidence ou actualité ?
N : Oui, malheureusement… ça a été fait bien avant, parce qu’André était allé là-bas un peu plus tôt, parce qu’on a plusieurs chansons sur l’album qui parlent de New York.
DI : On mets très longtemps à les imprimer, ces jaquettes, j’ai dû dessiner ça début septembre, et ça a pris un autre sens. C’est comme la chanson des Moldy Peaches, « NY city is like a graveyard », ça n’a plus le même sens.

André

Est-ce un rêve pour vous de jouer un jour en première partie de Sebadoh, reformés pour l’occasion ?
DI : En fait on a déjà réalisé nos rêves : on a joué le même soir que Daniel Johnston, dans le même festival que Suicide, en première partie de Two Dollar Guitar, on a fait la moitié de la tournée avec Julie Doiron dans le groupe, …
On a par contre loupé un super concert de 3h de Lou Barlow à Paris, puisqu’on jouait le même soir !
En même temps, je n’aime pas trop rencontrer les gens que j’admire, j’ai interviewé Lou Barlow il y a quelques années, Will Oldham aussi … Tu te rends compte que ce sont des gens comme toi, et quand tu vois que les gens que tu admirais au lycée disent des conneries avec lesquelles tu n’es pas d’accord, ça casse le mythe, ce sont finalement des gens normaux.

Tu as dit un jour vouloir enregistrer un album avec Chan Marshall (Cat Power), ça va se faire un jour ?
DI : Ah ! je croyais avoir dit que je voulais me marier avec elle ! Je veux bien me marier, et enregistrer un album avec elle après. Mais on n’a rien demandé du tout (rires). On adore ce qu’elle fait.
N : On joue quand même avec Julie Doiron, et son dernier album en solo est magnifique, elle toute seule à la guitare, avec une voix superbe.
Et un son de guitare magnifique !

Parmi les artistes français, il y a des gens que vous admirez ?
N : Il y a quelqu’un qui s’appelle Wilfried : on a sorti nous-mêmes un 45 tours de lui, et il va sortir en février/mars un album sur Prohibited. C’est quelqu’un qu’on aime beaucoup.

Comment vous voyez le futur d’Herman Düne ?
DI : J’aimerais bien que d’ici quelques mois (c’est ce qui est prévu pour l’instant) on enregistre un album avec Julie Doiron, chez elle au Canada, puis pourquoi pas poursuivre par une petite tournée avec elle dans le nord des Etat -Unis.
Et puis on va en angleterre très bientôt, on va passer chez John Peel.
N : On va peut-être tourner avec un groupe de Shrimper, Refrigerator, qui sont en fait ceux qui tiennent le label, mais rien n’est encore sûr.
On aimerait bien un jour aller habiter aux Etats-Unis.
DI : Moi j’essaye de sortir des disques, si j’ai un peu d’argent, un 45 tours de Jeffrey Lewis, qu’on a enregistré à Austin.
J’ai aussi fait une BD, que j’essaye de distribuer.

Interview  réalisée avec Radio Campus Grenoble, merci !

Site ami :
http://hermandune.free.fr
 
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