Vagabond Of The Western World

STEPHEN MALKMUS Real Emotional Trash

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Je ne sais pas si STEPHEN MALKMUS mesure le statut, ou la stature qui devient peu à peu la sienne dans le paysage indie-rock mondial. Avec une discographie qui se confond avec l'histoire du rock indépendant US des années 90 - entre PAVEMENT et SLIVER JEWS, on ne saura jamais lequel était le side-project de l'autre - Malkmus, la quarantaine passée, fait aujourd'hui figure, à la fin des années 2000, de personnage emblématique, repère monolithique pour tous les compositeurs à guitare en devenir.
A qui le comparer parmi les figures cultissimes qui l'ont précédé ? Même si STEPHEN MALKMUS a magistralement prêté sa voix au DYLAN de Todd Haynes, c'est plus à un LOU REED qu'on pense. C'est tout l'effet du mélange talent d'écriture/décontraction post-ado, jouissive guitare bruitiste/finesse mélodique, mine sombre/humour qui relie MALKUS au grand LOU. Cette aptitude naturelle à ne pas se laisser écraser par le rôle d'artiste classique (ou culte) de tout une génération n'y est pas étrangère non plus.

MALKMUS fait partie du maigre club des ex-membres de groupes cultes dont la production demeure excitante et attendue. Ce nouvel album signé avec THE JICK ne déroge pas à la règle - second album avec THE JICKS, mais quatrième post PAVEMENT, avec un groupe toujours à peu près composé de THE JICKS. On notera l'entrée dans le groupe de Janet Weiss, de QUASI et ex-SLEATER KINNEY. Ce qui sauvera tous les protagonistes de l'indie rock US 90ies, c'est qu'il y aura toujours le groupe d'un copain où rempiler.

"Real Emotional Trash" est donc le nouvel album de STEPHEN MALKMUS & THE JICKS sur lequel nous nous arrêterons aujourd'hui. Ne trahissant rien de ce que nous aimons chez lui, MALKMUS semble se faire plaisir en embarquant son groupe dans un trip vers un univers brut et libéré qui rappelle autant JAD FAIR que BLACK SABBATH et THIN LIZZY. L'indie rock des années 90, sa guitare abrupte et noisy, se jette dans le monde du proto hard-rock, fondu dans le métal le plus lourd, les jams généreusement étirés. L'album compte de nombreux longs titres - plus de six minutes, et jusqu'à dix - qui ne sont pas si éloignés de monuments épiques tels le "Child in time" de DEEP PURPLE.
Oui, ça joue. Plutôt oui. La sauce monte copieusement, les guitares se répondent ad lib, et la basse forge tout en fuzz la colonne vertébrale des chansons les plus impétueuses, celles sur lesquelles on sent le groupe se régaler, s'arrêtant au bout de dix minutes parce qu'il faut bien finir, mais capable de faire rester un quart de plus sur le même plan.
La richesse mélodique caractéristique de MALKMUS reste toujours aussi présente, sous l'explosion des guitares, il y a toujours un air imbattable, une phrase glissée dans le micro qui arrondit les angles, confère à la chanson la dimension pop lumineuse qui la fera rester dans notre tête pour le reste de la semaine.

Concluons enfin sur le masterpiece du disque, le premier single "Baltimore", morceau épique, dans lequel les tentations seventies de "Real Emotional Trash" sont les plus manifestes : un magnifique passage, où la mélodie reprise par guitare et orgue vient surfer sur un rouleau de saturations délicieusement grasses. "Baltimore" est d'ors et déjà un standard de 2008.

STEPHEN MALKMUS, Real Emotional Trash
(Matador)

http://www.stephenmalkmus.com/
http://www.myspace.com/stephenmalkmus